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Gouvernance en Algérie, le point de vue du Dr. Brahim Benyoucef

October 14, 2012 Gouvernance No Comments

Le pourrissement d’un système est l’aboutissement d’un long processus de corruption passée sous silence et qui finit par s’installer comme système normalisé et légitimé, entrainant le plus de monde. Ce phénomène s’est accentué depuis surtout une décennie, soit depuis l’ouverture du marché; la fin de l’isolement; la montée du prix de pétrole, la mondialisation et l’économie de marché quoique passé sous silence sous la décennie rouge. Il se traduit par une  gestion déficiente et non responsable; une action intense de dilapidation et de corruption; une course à l’appropriation à n’importe quel prix. ————————————————————————————————————————————————————————–

La gouvernance en Algérie :

Le point de vue du Dr. Brahim Benyoucef

 

Cet article s’inscrit dans le cadre d’une série de rencontres qui sont en cours de réalisation avec des professeurs, chercheurs et spécialistes algériens sur le mode de gouvernance en Algérie. L’équipe ” 1 2 3 Viva Algeria, le projet” a le plaisir de vous présenter le point de vue du Dr Brahim Benyoucef, expert consultant en urbanisme et en sciences sociales (excerçant à Montréal, Canada – voir biographie). Dr. Benyoucef nous a envoyé ce texte qui résume l’entretien vidéo qui nous a été accordés et qui sera diffusé, en exclusivité, très bientôt dans le cadre d’un grand reportage sur la gouvernance en Algérie…Bonne lecture !

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1. On peut partir de la définition suivante pour parler de gouvernance :

La gouvernance désigne l’ensemble des conditions dans lesquelles intervient la gestion des affaires publiques et même privées. On qualifie celle-ci de bonne gouvernance si ses conditions parviennent à assurer le bon fonctionnement  et la cohérence du système, et garantir son intégrité; à travers l’exercice de la gestion des risques, de l’utilisation rationnelle des ressources (valorisation des ressources), de la protection des droits  et de la durabilité du développement (de l’effet de développement). Une bonne gouvernance est fondée sur les principes de : Responsabilité; Imputabilité (capacité de rendre compte); Transparence; Participation; Équité; Justice; Justesse.

 2. L’examen de la situation en Algérie, révèle des conditions des plus compromettantes à la bonne gouvernance. Quelques exemples dont notamment dans le domaine de la gestion urbaine, foncière et immobilière viennent illustrer cette situation :

  • Déficience des outils de contrôle : occupation illicite, urbanisation anarchique avec tous les effets que cela peut causer à la société, l’environnement et à l’espace. (Comme solution, réhabiliter les mécanismes de contrôle, de planification et de gestion et réhabiliter l’autorité des institutions et de la loi, en veillant à l’équité, justice et justesse);
  • Déficit en ressources : considérant les effets sur la gestion et le fonctionnement des espaces urbains, du point de vue surtout de l’hygiène et, aussi les effets sur la qualité d’aménagement et d’équipement de ces espaces…(déficit en parcs, espaces de détente et autres équipements de base.. etc… (Comme solution établir un système de taxation foncière et immobilière, mettre en place un système transparent et participatif de gestion de ces ressources et réhabiliter la démocratie municipale);
  • Absence de vision et de stratégies : Urbanisation spontanée des espaces, régularisée au coup par coup et au jour le jour, avec tous ses effets sur l’espace, l’environnement et la société. (Comme solution,  réhabilitation des outils de planification, de concertation et de participation);
  • Érosion et dilapidation des ressources foncières causée par la corruption, la mauvaise gestion, la course à l’appropriation, le détournement du patrimoine foncier, (occupations illicites comme réponse à la corruption qui sévit au sein des instances locales.)transferts irréguliers; régularisation systématique, détournement du foncier agricole…..avec tous les effets sur l’urbanisme, l’environnement et l’économie. (comme solution, prévoir des outils de régulation dont une bourse du marché foncier ; transparence dans la gestion, réhabilitation de l’autorité, du droit et de l’équité dans la gestion des programmes de promotion foncière et immobilière, tenir un registre central pour indiquer les bénéficiaires…)

3. Quant aux causes de tels phénomènes, l’analyse conclut que :

Le pourrissement d’un système est l’aboutissement d’un long processus de corruption passée sous silence et qui finit par s’installer comme système normalisé et légitimé, entrainant le plus de monde. Ce phénomène s’est accentué depuis surtout une décennie, soit depuis l’ouverture du marché; la fin de l’isolement; la montée du prix de pétrole, la mondialisation et l’économie de marché quoique passé sous silence sous la décennie rouge. Il se traduit par une  gestion déficiente et non responsable; une action intense de dilapidation et de corruption; une course à l’appropriation à n’importe quel prix. Cette situation a été rendue possible grâce à la complicité de tous; l’affaiblissement des institutions publiques et du droit; le renforcement des pouvoirs de personnes; la neutralisation et la manipulation du pouvoir judiciaire, du pouvoir de la presse et des mécanismes de contrôle; l’absence d’imputabilité et de réédition de compte et enfin l’esprit de clientélisme.

4. L’impact fatal :

En plus aux effets immédiats, le plus grave est la culture que cela génère, qui développe des comportements et attitudes que l’on voit s’installer et se généraliser et constituer la trame de la nouvelle culture standard. Cette culture s’accompagne de rupture du lien citoyen-État; de la négation de l’État, de l’intérêt public et du bien-être collectif; de la banalisation de l’autorité de l’État; de la rupture du lien de confiance et de la crise de crédibilité et de légitimité. Dans ce contexte la loi devient un instrument de pression contre le faible, vidée entièrement de son sens en l’absence d’équité, elle devient source de frustration. Tous se substituent à l’État et chacun agit en conséquence, chacun s’assure sa part. Le sens collectif s’effondre; le bien commun ne veut plus rien dire;  seule la course à l’occupation et à prendre part du gâteau, sans se soucier  d’autre chose s’impose comme impératif dans la mentalité de chaque citoyen.

5. Solution : Prévoir un programme global de réforme qui doit inspirer les réformes sectorielles; celui-ci doit résulter d’une volonté ferme de tous et surtout du pouvoir politique afin de réhabiliter

  • Droit, justice et équité;
  • Autorité publique, imputabilité et Réédition de compte;
  • Participation et Transparence; liberté et démocratie;
  • Culture institutionnelle, renforcer le pouvoir des institutions et non de personnes;
  • Réhabiliter le lien de confiance, la crédibilité de l’état et la conscience et culture citoyennes.

Par Dr Brahim Benyoucef, expert consultant en urbanisme et en sciences sociales

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